Voilà 15 jours que nous avons quitté Floridablanca. 15 jours que nous bravons la cordillère orientale. 15 jours que nous enchaînons montées ardues et descentes sportives. Voici le récit de ces, seulement, 273 km en 10 étapes, 7200 m de dénivelé positif ( montées) , 6400 m de dénivelé négatif ( descentes) qui nous laisseront des souvenirs inoubliables !


Nous quittons Floridablanca le 10 juillet en compagnie de notre ami Gerardo qui nous accompagne et nous guide pour cette première étape. Dès les premiers kilomètres, sur un joli chemin qui descend le long des champs de tabac, nous sommes conquis.

S’en suivent ensuite de bonnes montées et quelques faux plats sur une petite route goudronnée et tranquille qui nous emmène jusqu'à l’impressionnant canyon de Las Iguanas.

Gerardo nous quitte sur les hauteurs du canyon d’où nous avons une vue imprenable sur la montée colossale qui nous attend le lendemain.

Mais pour l’heure, il est temps de dire au revoir à notre ami avant de terminer cette première journée par une descente en lacet jusqu'à la rivière. Nous camperons un kilomètre plus haut sur le parking d’une épicerie. Nous ne sommes qu’à 600m d’altitude et la nuit est encore un peu chaude. Nous avons la désagréable surprise de trouver un petit scorpion noir près de la tente , il faudra donc veiller à garder les chaussures fermées dès que le soir tombe !

Nous sommes assaillies par de toutes petites mouches qui nous piquent en laissant sur nos jambes de petits points rouges qui démangent. Ces vilaines bestioles n’auront de cesse de nous harceler pendant tout notre parcours sur la cordillère !l


C’est le 11 juillet dès 9 heures que nous entamons les 25 km d’ascension jusqu'à Zapatoca. La montée est digne de l’Alpe d’Huez. Pendant les 12 premiers kilomètres nous encaissons pas moins de 1400m de dénivelé positif ! Nous gravissons les virages un à un à une vitesse moyenne de 4 km/h.

A 11 heure nous faisons une longue pause au bar El Mirador d’où nous avons une vue imprenable sur les lacets en contre-bas. Il nous reste encore de bonnes pentes et la moitié du chemin pour atteindre Zapatoca. La vue est à couper le souffle et nous avons le temps d’apprécier le paysage.

Nous grignotons tout le long de la route des gâteaux, des bananes, des barres de céréales. L’ultime grimpette est difficile d’autant que le grain nous a rattrapé et que nous terminons sous la pluie. Nous arrivons vers 16h dans le joli bourg tout en pente de Zapatoca où, après avoir trouvé une confortable chambre d’hôtel, nous allons savourer un réconfortant chocolat chaud accompagné de son énorme part de gâteau au chocolat.

Une petite douche ( glacée) et un salchipapa plus tard nous nous écroulons sur nos lits. Nous sommes à 1600m d’altitude, la nuit est fraîche et il fait bon se pelotonner sous les couvertures ....


Le 12 juillet, après une petite montée pour sortir de la ville, ce sont 26 km de descente qui nous attendent. Je ne suis pas très en forme ce matin là et l’étape sera, pour moi, difficile. Le chemin qui descend jusqu'à La Fuente est en terre et en pierre. Nous ne dépassons pas les 8km/h, les mains constamment sur les freins et les vélos secoués de toute part dans un bruit de casserole. Le matos tient bon et les cyclos aussi.

Même si j’ai plus d’une fois envie de jeter ma monture dans le décor, il faut admettre que le panorama est à couper le souffle et que nous ne prenons plein les yeux !

Nous stoppons l’étape à La Fuente, je n’ai pas le courage d’entamer la remontée jusqu'à Galan. Nous trouvons une très belle hospedage, tenu par un couplé charmant qui nous fait la chambre à prix d’ami car il nous a vu gravir le canyon ! Je reste me reposer pendant que l’équipe profite d’une belle soirée sur la paisible place du village.

La Fuente est un petit bourg colonial aux maisons toutes blanches, aux rues pavées et tranquilles où des hommes en chapeau de cowboy jouent aux cartes, le soir, à l’ombre des arbres du parc central...


Il nous faut deux jours de plus pour atteindre Barrichara où nous avons prévu de faire une pause.

Le 13 nous roulons jusqu'à Galan. Encore un très beau village aux rues pavées, aux maisons blanches et bois, à la reposante et ombragée place centrale. Après une rafraîchissante baignade à la sortie de La Fuente, nous enchaînons montées et descentes sur une route en" ripio "( en terre et cailloux).

C’est toujours aussi beau et difficile. Nous arrivons à Galan vers 13h et hésitons à poursuivre la route. Nous restons un long moment discuter avec deux sympathiques colombiens bientôt rejoints par une bande de collégiens. Les questions fusent, la discussion est animée, ils veulent des détails sur notre périple, demandent l’adresse de notre blog et nous conseille d’attendre le lendemain pour monter jusqu'à Barrichara.

Les jeunes nous escortent jusqu'au commissariat pour demander l’autorisation de camper sur la pelouse du parc central, on nous offre des cafés et Loïs se fait " kidnapper " une bonne partie de l’après-midi par une bande de jeunes footballeurs bien décidés à lui faire visiter le village ! L’atmosphère autour de cette place est bien paisible. Les gens nous saluent, discutent , deux femmes viennent même nous proposer une visite de la ville. Nous les suivons à la découverte d’une voie pavée vieille de 200 ans qui est cours de réhabilitation.

Nous retrouvons Loïs et sa joyeuse bande en fin d’après-midi, allons manger picadas et hamburger dans une "comida rapida" et plantons nos tentes sur l’herbe moelleuse du parc.


Le lendemain, nous quittons de bonne heure notre spot de camping et nous lançons à l’assaut du chemin qui mène à Barrichara. D’abord une descente toute en cailloux jusqu'à la rivière puis une remontée sur une belle piste sur le flanc opposé.

Ça grimpe pendant 15km mais la piste est vraiment belle. Nous suivons un camion" épicerie " qui s’arrête à chaque intersection proposer ces produits aux habitants qui l’attendent sur le bas-côté. Quand nous le rattrapons enfin, nous faisons le plein de bananes, ananas et oranges que nous dégustons immédiatement en admirant la vue.

Nous arrivons,en début d’après-midi, bien fatigués, à Barrichara première étape de notre virée sur la cordillère.

Nous y passons la journée du 15. L’auberge où nous logeons est douillette et très belle avec son patio intérieur de style colonial, murs blancs , poutres et boiseries apparentes, tommettes au sol.

Barrichara très touristique, est connu pour être un des plus beau village de Colombie. Ses petites ruelles en pente offrent de très belles vues sur les montagnes tout autour, les maisons sont impeccablement peintes en blanc avec des volets, des moulures et des sous-bassements dans des tons de verts et de bleus...bref, c’est charmant et il fait bon s’y reposer après tous ses efforts !


Le 16 juillet, une belle route bitumée (!!) nous amène jusqu'à San Gil où nous devons retrouver Elouan, éducateur et joueur de rugby au club du Skrank. Nous le rejoignons donc dans un hostal où il est installé depuis quelques jours avec 4 ami(e)s français. Ils ont fait la traversée de l’Atlantique en voilier et ont voyagé entre les Antilles, le Chili et la Colombie où ils se sont retrouvés.

En bon voyageurs, nous échangeons expériences et souvenirs et donnons rendez-vous à Elouan dans quelques semaines à Riantec !


Nous reprenons la route le 17 juillet en empruntant la route 45, route principale reliant Bucaramanga à Bogotá. Les paysages sont toujours aussi beau, c’est vraiment moins plaisant à cause de la circulation mais il nous faut avancer si on veut être dans les temps à Bogotá !

On se prend une bonne averse en fin d’après-midi et après une pause goûter à regarder tomber la pluie, on quitte la 45 pour trouver un endroit où dormir. On se retrouve sur un petit chemin qui longe de belles fincas de café.

On demande à poser les tentes dans l’une d’elle. Deux femmes nous accueillent et nous laissent camper tout en bas de leur terrain.

Ce n’est pas très plat et surtout très humide...à peine les dernières sardines plantées, une grosse pluie d’orage nous tombe dessus! On s’abrite sous le auvent de la grande tente qui commence sérieusement à prendre l’eau...ça goute de partout !

Heureusement la pluie cesse et nous pouvons cuisiner notre plat de pâtes-sauce tomate favori amélioré, ce soir, de quelques arepas revenues à la poêle ! ( les arepas sont d’épaisses crêpes de maïs, les meilleures sont fourrées au fromage ....miam!)


Après un réveil humide, nous reprenons, le 18 juillet au matin, le petit sentier qui traverse les plantations de café avant de retrouver la route 45 pour quelques kilomètres jusqu'à Oiba.

Une bonne assiette de poulet frit et un gros ravitaillement au supermarché plus tard, nous prenons une petite route qui doit nous mener près du village de Guadalupe. Nous avons décidé camper tout près de la quebrada de Las Gachas ( Las Gachas est un petit ruisseau peu profond avec des piscines naturelles dans le lit de la rivière.) La route est encore une fois bien vallonnée avec une belle montée finale bordée de café, de feuilles géantes et de plants de cacao. C’est vert, c’est paisible, c’est très beau !

Nous quittons la route de Guadalupe pour emprunter un chemin rocailleux jusqu'à un terrain de camping. Il s’agit du jardin d’une maison, les propriétaires ont aménagé des sanitaires à l’extérieur, nous sommes tout seuls, nous avons une vue imprenable sur la chaîne de montagne.

La pluie nous surprend ce soir-là encore, au moment du repas.

Nous cuisinons nos arepas-oeufs-ratatouille sous l’abri de la maison avant d’aller nous glisser dans nos duvets, bien au frais !


Le 19 juillet, c’est jour de pause : grasse matinée, petit-déjeuner pancakes puis lessive et temps libre.

En début d’après-midi nous prenons serviettes et maillots de bain pour nous rendre à pied à Las Gachas. Le sentier démarre du bas de notre camping et passe à travers les près. Quinze petites minutes de marche pour descendre jusqu'à la rivière et ses étonnants trous d’eau.

L’endroit est très joli et les enfants commencent à tester la profondeur de ces piscines naturelles.

La roche est très glissante et on voit plusieurs personnes chuter. Les enfants sont donc très prudents, se laissent glisser sur les fesses....mais Lois, pourtant chausser de ses sandales, fait un faut pas et tombe ! Le bras prend en premier puis la tête ! Des gens accourent, il est tout pâle et n’arrive pas se relever. Arrivés près de lui on constate tout de suite qu’il saigne de la tête et que des points de suture sont nécessaires. Lois est désorienté et n’arrête pas de demander "où est-ce qu’on dort?" . Petit moment de stress... les gens nous indiquent qu’il y a un hôpital à Guadalupe. On laisse Lois reprendre un peu ses esprits puis on prend le chemin en sens inverse jusqu'au camping. Loïs est tout pâle mais commence à retrouver la mémoire petit à petit. On appelle un taxi qui nous emmène à Guadalupe, à 6 km de là. L’hôpital est en fait un dispensaire. Nous sommes tout de suite pris en charge par des infirmières qui nettoient la plaie et l’anesthésie avant que le docteur la suture. 12 points un peu au-dessus de l’oreille et un bel hématome !

Le médecin est un peu inquiet quand on lui raconte la perte de mémoire et nous dit de bien surveiller Lois et de revenir au moindre soucis .

On décide de rester dormir dans un hôtel de la ville pour être plus proche du dispensaire. Après un aller- retour au camping pour prendre quelques affaires nous passons donc la soirée et la nuit à Guadalupe.

Notre blessé s’endort vite et passe une bonne nuit alors que ses parents ont du mal à trouver le sommeil !

On est finalement soulagé le lendemain matin, on retourne au dispensaire pour que le médecin examine Loïs puis nous rentrons au camping. Lois est bien fatigué et se repose une bonne partie de l’après-midi alors que Yoann, Charlotte, Nino et moi retournons à Las Gachas profiter de la rivière sans en garder un trop mauvais souvenir !

Cette mésaventure après 329 jours de voyage nous a un peu refroidi, mais on s’en sort bien. L’équipe devrait pouvoir poursuivre sa route jusqu'à Bogotá !


Nous sommes donc à nouveau sur nos montures, prêts à partir le 21 juillet au matin.

Lois ne peut pas mettre son casque à cause de l’hématome, il a un peu mal à la tête mais est assez en forme pour rouler. La piste que nous empruntons n’est pourtant pas facile, ça secoue pas mal.

Nous nous arrêtons déjeuner à l’impressionnante cascade de Los Caballeros.

Peu après la cascade la piste devient route et nous terminons l’étape par une infaisable montée à 19%! Il faut donc pousser les vélos pendant quelques kilomètres avant que la pente ne s’adoucisse. Peu avant la ville de Suaita, où nous passerons la nuit, une joyeuse bande de Colombiens nous invitent à discuter et à partager bière et soda avec eux.

L'ambiance est bonne et amicale, c'est ça l'accueil Colombien !


Les 22 et 23 juillet nous poursuivons notre route jusqu'à la ville de Moniquira. Une petite route puis une belle grimpette sur un chemin pas vraiment carrossable nous amène, le premier jour, jusqu'à la petite cascade de Pozo Verde.

Nous bivouaquons sur un beau terrain d’herbe au-dessus de la cascade et allons visiter l’usine de fabrication de panela juste à côté. Le jus de canne à sucre est ici chauffé jusqu'à devenir une pâte qui est mise à refroidir dans de grands moules carrés. Les blocs de sucre ainsi formés sont ensuite mis en carton et livrer dans toute la région. Nous assistons à la toute fin du processus. Les hommes qui travaillent là doivent supporter la forte chaleur des cuves tout au long de la journée.

La fabrique tourne 24h/24, ,le dimanche est consacré au fauchage de la canne à sucre. Les conditions de travail ont l’air rudes mais ces ouvriers nous accueillent avec le sourire et prennent, le temps de nous montrer leur travail. Ils nous offrent deux gros blocs de panela au moment de partir.

On passe une belle soirée sur notre petit camping privé... un petit apéro cacahuète et ananas ( on ne s’en lasse pas, on en mange un chaque jour !), une partie de volley, encore des pâtes à la sauce tomate et une bonne nuit de sommeil bercés par le chant de la cascade et l’odeur de la canne à sucre qui cuit...


Le 23, nous quittons le ripio pour un bel asphalte mais l’étape de la veille à laisser des traces. Nous nous arrêtons pour le déjeuner à Moniquira. Après la ville, une grosse montée nous attend et l’équipe ne se sent pas le courage de l’affronter.

Mais les hôtels de la ville ne nous disent rien non plus....alors on fait le plein de nourriture pour motiver nos jeunes cyclos( ananas, arepas, gâteau au chocolat et même pâte à tartiner !)et on part à l’assaut des 5 premiers kilomètres de la montée pour rejoindre une cascade. Finalement, 2 km après la sortie de la ville, nous tombons sur un luxueux hôtel dans un grand parc qui fait aussi camping (pour un prix défiant toute concurrence !) . Pour la plus grande joie des enfants nous plantons nos tentes entre le terrain de volley, l’espace barbecue et la piscine juste avant que l’averse vienne nous arroser.

Nous profitons d’un bon repas, à l’abri, autour d’une table !


Le lendemain, alors que nous sommes prêts à partir, que les tentes sont démontés et que les vélos sont chargés, les enfants protestent et se révoltent ! Ils veulent rester faire une pause ici pour profiter du terrain de volley et de la piscine....après d’âpres négociations, nous cédons !

Petite journée tranquille et reposante qui se termine autour de savoureuses pechugas de pollo au barbecue !


Nous sommes maintenant à 1600m d’altitude, il nous faut monter à 3000m puis redescendre sur l’altiplano à 2500m pour atteindre Bogotá....plus que 6 jours de vélo et moins de 2 semaines en Colombie avant de s’envoler vers la France !